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Et si les crypto-monnaies comme l’ETH venaient à être classées comme des valeurs mobilières?

La plupart des crypto-monnaies le sont. C’est du moins ce qu’estime le président de la Securities and Exchange Commission, Gary Gensler. À l’occasion de nombreux interviews et discours, Gensler a réitéré son point de vue – et celui de son agence – selon lequel « la plupart des jetons crypto sont des contrats d’investissement en vertu du test de Howey ». Cela veut dire qu’il s’agit de valeurs mobilières et que si leurs émetteurs ne les enregistrent pas en tant que tels, alors la SEC pourrait très facilement intenter une action en justice.

En effet, cela s’est déjà produit à plus d’une reprise, la SEC ayant pris des mesures ces dernières années à l’encontre de RippleTelegram et LBRY, ainsi que contre plusieurs plateformes de négoce (telles que NexoPaxos et Gemini). Et si le procès en cours entre la SEC et Ripple se solde par une décision du juge en faveur de l’autorité de régulation, une vague d’actions de ce type pourrait avoir lieu dans les années à venir.

En effet, une victoire de la SEC contre Ripple pourrait corroborer la thèse selon laquelle la plupart des crypto-monnaies, y compris l’Ethereum (ETH), devraient être classées comme des valeurs mobilières en vertu du droit américain. Ainsi, cette victoire pourrait entraîner une contraction du secteur américain des crypto-monnaies, car les plateformes et les projets devraient s’enregistrer auprès de la SEC, bien qu’elle puisse profiter involontairement au Bitcoin que la SEC ne considère pas comme une valeur mobilière.

Gouvernement américain

Pourquoi la SEC classe-t-elle déjà les crypto-monnaies comme l’ETH dans la catégorie des valeurs mobilières ?

Alors que le droit écrit et la jurisprudence restent quelque peu flous en ce qui concerne la classification des crypto-monnaies comme valeurs mobilières (ou non), de plus en plus de discours et de preuves accréditent la thèse selon laquelle la SEC pense que la plupart d’entre elles le sont.

Prenons par exemple le discours prononcé par Gary Gensler lors de la conférence annuelle de la Penn Law Capital Markets Association en avril 2022. Voici l’une de ses déclarations les plus révélatrices :

« Le fait est que la plupart des jetons cryptographiques impliquent un groupe d’entrepreneurs qui lèvent des fonds auprès du public dans l’espoir de générer des bénéfices, ce qui constitue l’essence même d’un contrat d’investissement ou d’une valeur mobilière relevant de notre juridiction. Certains, probablement quelques-uns seulement, sont comme de l’or numérique ; ils peuvent ne pas être des valeurs mobilières. »

Gensler a fait écho à ses propres propos dans une autre tribune récente, lors d’une interview de février 2023 accordée à l’Intelligencer du New York Magazine. Dans cet article, il suggère que le Bitcoin n’est pas une valeur mobilière, bien qu’il n’indique pas clairement s’il s’agit de la position officielle de la SEC.

« Pour toutes cryptos autres que le Bitcoin, vous pouvez trouver un site web, vous pouvez trouver un groupe d’entrepreneurs, ils peuvent créer leurs entités légales dans un paradis fiscal offshore, ils peuvent avoir une fondation […] Ils peuvent déposer leurs jetons à l’étranger au début et soutenir ou prétendre qu’il faudra six mois avant qu’ils ne reviennent aux États-Unis […] Mais au fond, ces jetons sont des valeurs mobilières parce qu’il y a un groupe au milieu et que le public anticipe des bénéfices basés sur ce groupe. »

Cette position est assez claire. La SEC considère la plupart des crypto-monnaies comme des valeurs mobilières, et elle a agi conformément à ce point de vue, en engageant des actions en justice lorsqu’elle a jugé qu’il était possible et conséquent de le faire. Parmi les jetons probablement visés figure l’Ethereum, en particulier au regard de l’adoption par ce dernier d’un mécanisme de consensus par preuve d’enjeu.

Qu’adviendra-t-il si Ripple perd son procès contre la SEC ?

Toutefois, la situation pourrait considérablement empirer pour les crypto-monnaies si la SEC finissait par gagner son procès contre Ripple. Comme l’a récemment déclaré le PDG de Ripple, Brad Garlinghouse, dans des interviews, le verdict de ce procès « sera déterminant pour l’ensemble du secteur, » dans la mesure où il créera une jurisprudence susceptible d’entraîner des actions en justice à l’encontre d’autres projets et entreprises de crypto-monnaies.

En effet, le directeur juridique de Ripple, Stuart Alderoty, a déjà conseillé aux entreprises de crypto-monnaies aux États-Unis de s’établir à l’étranger, compte tenu de l’incertitude de la loi actuelle. Une victoire de l’autorité de régulation ne fera qu’aggraver la situation, car elle confirmera juridiquement le point de vue de la SEC, tout en la confortant dans sa volonté d’engager des poursuites contre d’autres entreprises.

Stuart Alderoty tweet on Gensler and the SEC.

Source : Twitter

Dans l’hypothèse d’une victoire de la SEC, le plus grand perdant pourrait être les États-Unis, dont le secteur des crypto-monnaies pourrait fuir vers des cieux plus cléments. Toutefois, pour les entreprises et les plateformes d’échange qui font le choix de continuer à évoluer sous la juridiction américaine, les effets seront probablement délétères.

Les plateformes basées aux États-Unis risquent d’enfreindre les lois sur les valeurs mobilières. Elles pourraient être amenées à suivre l’exemple de Coinbase en décembre 2020, lorsqu’elle a radié le XRP en réponse à l’action en justice de la SEC à l’encontre de Ripple. Il ne lui resterait alors que très peu de crypto-monnaies à lister légalement, ce qui réduirait peut-être le nombre de jetons pris en charge à Bitcoin et à ses forks (par exemple Litecoin, Bitcoin Cash), ainsi qu’à une petite poignée de jetons véritablement décentralisés et fondés sur la communauté.

Il va sans dire que cette éventualité serait extrêmement dommageable pour les cours. Le XRP a chuté d’environ 63 % en l’espace d’une semaine après le déréférencement de Coinbase, ce qui montre à quel point la perte subie par les investisseurs et les négociants américains pourrait être préjudiciable à la demande.

Ripple price chart.

Cours du XRP entre novembre 2020 et janvier 2021. Source : CoinGecko

D’un autre côté, on peut tout à fait soutenir qu’une victoire de la SEC serait extrêmement favorable au Bitcoin et (dans une moindre mesure) à ses branches (forks). Comme Gary Gensler l’a laissé entendre à plusieurs reprises, l’autorité de régulation des marchés financiers ne considère pas le Bitcoin comme une valeur mobilière, ce qui laisserait aux investisseurs et aux plateformes de trading aux États-Unis l’entière liberté d’en détenir et d’en transférer. Nous pourrions ainsi assister à un renforcement substantiel de la domination du BTC sur le marché des crypto-monnaies, ce qui pourrait le propulser vers de nouveaux sommets.

Cela dit, le procès LBRY-SEC suscite l’espoir que, même en cas d’issue négative, les plateformes basées aux États-Unis pourront toujours être libres de coter le XRP (et, par extension, de nombreuses autres cryptomonnaies équivalentes). En effet, un procès en appel a conclu que la vente de jetons LBC par des tiers ne représentait pas une offre de valeurs mobilières non enregistrées. Cela signifie que les tiers, par exemple les plateformes, sont légalement libres de continuer à soutenir les échanges de LBC.

Bien entendu, il reste à voir si les plateformes américaines se sentent suffisamment à l’aise pour référencer à nouveau le LBC, ou si elles se sentiraient suffisamment à l’aise pour inscrire de nombreuses autres crypto-monnaies dans l’éventualité d’une défaite décisive de Ripple. Néanmoins, l’on peut affirmer que les perspectives d’une telle défaite sont en fait assez faibles.

Comme nous l’avons écrit à plusieurs reprises, Ripple a obtenu un certain nombre de décisions et d’arrêts importants favorables jusqu’à présent. Plus récemment, le tribunal a écarté l’opinion formulée par un témoin expert sollicité par la SEC, dont le régulateur espérait qu’il démontrerait que Ripple avait créé une attente raisonnable de bénéfices parmi les acheteurs de XRP. L’exclusion de la thèse du témoin confirme que la SEC n’a pas suffisamment étayé ses arguments devant le tribunal et qu’un règlement pourrait bientôt intervenir, qui permettrait à Ripple de poursuivre ses activités plus ou moins comme avant.

Pour cette raison, le marché peut raisonnablement espérer que nous ne basculerons pas dans une ère où la plupart des crypto-monnaies seront définitivement classées comme des valeurs mobilières. Mais seul l’avenir nous le dira…

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CryptoVantage Author Simon Chandler

About the Author

Simon Chandler

Simon Chandler is a journalist based in London. He writes about technology, markets and politics, and has bylines for Forbes, Digital Trends, CCN, Wired, TechCrunch, the Verge, the Sun, the New Internationalist, and TruthOut, among many others. His Twitter handle is @_simonchandler_

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